L’obésité, un problème de santé publique croissant, ne se limite pas à ses effets métaboliques. Une étude récente menée par la Southern Medical University de Guangzhou, publiée dans Frontiers of Medicine en novembre 2023, met en lumière un lien étroit entre l’obésité et le risque accru de divers cancers.
1. Une inflammation chronique et silencieuse
L’obésité entraîne une accumulation excessive de tissu adipeux qui déclenche une réponse inflammatoire continue dans l’organisme. Ce processus inflammatoire est qualifié de « silencieux » car il se développe sans symptômes apparents, mais il est particulièrement nocif sur le long terme.
Le tissu adipeux en excès attire des cellules immunitaires spécifiques, notamment les macrophages, qui s’infiltrent dans ce tissu et commencent à produire des molécules pro-inflammatoires appelées cytokines.
Ces cytokines, comme le TNF-α et l’IL-6, créent un environnement propice à la transformation cellulaire et au développement tumoral. Cette inflammation chronique perturbe également les mécanismes naturels de défense de l’organisme contre les cellules anormales.
2. Déséquilibres hormonaux
Le tissu adipeux n’est pas inerte, il joue un rôle majeur dans la production et la régulation des hormones. Dans le contexte de l’obésité, ce tissu devient une source importante d’œstrogènes, particulièrement après la ménopause.
Ceci s’explique par la présence d’une enzyme, l’aromatase, qui convertit les androgènes en œstrogènes dans le tissu adipeux. Cette production excessive d’œstrogènes crée un environnement hormonal déséquilibré qui peut stimuler la croissance de cellules sensibles aux hormones, notamment dans les tissus mammaires et utérins.
De plus, l’obésité affecte également d’autres hormones comme l’insuline et les facteurs de croissance apparentés à l’insuline (IGF), créant un terrain propice au développement tumoral.
3. Dérégulation du microbiote intestinal
Le microbiote intestinal, véritable écosystème composé de milliards de micro-organismes, est profondément altéré chez les personnes obèses.
Cette perturbation, appelée dysbiose, modifie la composition et la diversité des bactéries intestinales. Les changements dans le microbiote affectent la perméabilité intestinale, permettant le passage de substances pro-inflammatoires dans la circulation sanguine.
De plus, certaines bactéries peuvent produire des métabolites spécifiques qui influencent le métabolisme énergétique et la réponse immunitaire de l’hôte, créant un environnement favorable au développement cancéreux.
4. Rôle des adipokines
Le tissu adipeux fonctionne comme un véritable organe endocrinien, sécrétant diverses molécules de signalisation appelées adipokines.
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Dans l’obésité, la production de ces adipokines est déréglée. La leptine, une hormone clé dans la régulation de l’appétit, voit sa production augmentée, tandis que l’adiponectine, qui a des propriétés anti-inflammatoires et anti-tumorales, diminue.
Ce déséquilibre crée un environnement métabolique complexe qui peut favoriser la croissance cellulaire anormale et inhiber les mécanismes naturels de protection contre le cancer.
5. Stimuli physiques
L’excès de masse grasse, particulièrement au niveau abdominal, exerce des contraintes mécaniques sur les organes environnants.
Cette pression physique accrue peut provoquer des modifications tissulaires, notamment une fibrose, caractérisée par l’accumulation excessive de tissu conjonctif. Ces modifications structurelles peuvent perturber l’architecture normale des tissus et créer un environnement physique propice au développement de cellules cancéreuses.
De plus, ces changements peuvent affecter la circulation sanguine et lymphatique locale, perturbant ainsi les mécanismes naturels de surveillance immunitaire.

Des stratégies pour contrer le risque de cancers liés à l’obésité
Face à ces mécanismes, des stratégies ciblées peuvent réduire significativement les risques.
1. Gestion du poids
- Adopter un régime alimentaire anti-inflammatoire, riche en fruits, légumes, fibres, et pauvre en mauvaises graisses et en sucres. Le régime méditerranéen est un exemple pertinent.
- Pratiquer une activité physique régulière pour réduire l’inflammation chronique et améliorer le métabolisme.
- Envisager une chirurgie bariatrique pour les cas d’obésité sévère. Cette méthode diminue l’incidence des cancers chez les patients obèses.
2. Interventions pharmacologiques
- Les agonistes du GLP-1, utilisés pour la perte de poids, sont prometteurs dans la réduction des risques liés à l’obésité.
- Développer des médicaments ciblant les voies oncogènes spécifiques identifiées dans l’obésité.
3. Recherche et innovation
Les scientifiques insistent sur l’importance de recherches supplémentaires pour comprendre :
- Les différences entre l’obésité acquise et héréditaire.
- Les effets combinés du vieillissement et de l’obésité sur la cancérogenèse.
- L’interaction complexe entre microbiote intestinal, obésité et cancer.

Ce qu’il faut retenir
- L’obésité est un facteur de risque majeur pour plusieurs types de cancers.
- L’inflammation chronique et les déséquilibres hormonaux jouent un rôle clé dans ce lien.
- Des stratégies combinant nutrition, activité physique et traitements médicaux sont essentielles.
- La chirurgie bariatrique peut réduire significativement les risques pour les cas sévères.
- Une approche multidimensionnelle reste indispensable pour contrer l’incidence des cancers liés à l’obésité.
Source: Frontiers of Medicine Nov, 2023 DOI: 10.1007/s11684-024-1094-2 Novel perspectives on the link between obesity and cancer risk: from mechanisms to clinical implications
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2 réponses
Ayant mes propres parents, décédés bien trop de cancer du système digestif, je ne fais qu’alerter sur les méfaits de la pseudo-nourriture industriel.
En espérant faire changer les esprits sur la malbouffe et les modifications apportées sur des aliments qui étaient encore, il n’y a que quelque décennies, moins mauvais, pour l’homme « et » pour l’environnement.
Malheureusement, pour bien trop de personnes, manger est une drogue. Encore plus lorsqu’il y a beaucoup de goût. (Fast-food, plats industriels et autres…)
Totalement d’accord !